Il y a quelques jours, Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec ont publié sous forme de classement des données relatives au taux de décrochage des écoles secondaires du Québec. On ne peut que saluer l’intérêt que portent ces deux grands quotidiens à la réussite des élèves, dans la mesure où il s’agit d’aider les parents en leur fournissant suffisamment d’informations pour qu’ils puissent faire un choix éclairé quant à l’école que fréquenteront leurs enfants.
Cette initiative nécessite cependant de rappeler qu’il est possible d’aller plus loin en y ajoutant un ensemble de mesures d’efficacité. La dynamique scolaire est complexe et ne peut se résumer à un seul indicateur. Un taux d’abandon scolaire élevé peut être le symptôme d’un problème plus profond, mais il peut aussi traduire une situation particulière à l’école. Par exemple, les écoles Père-Marquette, Saint-Henri et Pierre-Dupuy, à Montréal, ont obtenu un taux de décrochage parmi les dix plus importants au Québec. Elles avaient toutefois une clientèle étudiante composée d’élèves handicapés ou en difficulté de plus de 40 % selon les données du ministère de l’Éducation. Ces trois écoles ont également eu par le passé une proportion importante d’élèves en retard dans leur cheminement scolaire. Bien que le classement publié ait identifié les écoles avec une clientèle étudiante en difficulté, ne tenir compte que du taux de décrochage peut mener à des conclusions extrêmes qui représentent mal le rendement de l’école et l’impact réel de la direction et du personnel sur la réussite des élèves.
C’est pourquoi l’Institut économique de Montréal contribue chaque année, depuis neuf ans, à la publication d’un Palmarès des écoles secondaires du Québec (voir : www.iedm.org) dans le magazine L’actualité. Cette évaluation tient compte d’une dizaine de facteurs qui mesurent les résultats des élèves et permettent de mettre en contexte le rendement des écoles. Parmi ces facteurs, on retrouve notamment les résultats scolaires, le taux de promotion, la proportion d’élèves en retard sur le cheminement normal ainsi que le revenu des parents. Cette évaluation est utile aux yeux des parents à la fois pour choisir l’école que fréquentera leurs enfants, afin de comprendre les facteurs qui relèvent du dynamisme propre à leur école et ceux qui sont tributaires du milieu socioéconomique des élèves, ainsi que, une fois ce choix effectué, pour poser des questions à leur administration scolaire sur l’efficacité de leur école.
Isolément, il est long et ardu pour chaque parent de trouver toute l’information nécessaire pour juger du rendement de l’école de son quartier. Rendre publique une évaluation rigoureuse et transparente des écoles secondaires réduit de beaucoup le coût de cette recherche d’informations. Par exemple, en Caroline du Nord, les parents ont la possibilité de demander que leur enfant fréquente une école publique autre que celle de leur quartier. Les commissions scolaires de l’État n’ont toutefois pas à informer les parents des résultats relatifs de chaque école. Le National Bureau of Economic Research américain a mené une expérience en fournissant à des parents une fiche d’information simplifiée sur les résultats scolaires des élèves de chaque école de cet État. Cette étude a démontré qu’informer directement les parents à propos des résultats des élèves de chaque école aux tests standardisés augmentait de beaucoup la participation des parents au choix de l’école, en particulier dans les milieux défavorisés. Sans surprise, ce choix a favorisé les meilleures écoles.
Il en est ainsi puisque les programmes d’évaluation et de comparaison des écoles introduisent un élément de concurrence entre les institutions en permettant aux parents de faire un choix éclairé et responsable. Ceux-ci pourront ainsi à leur gré récompenser une école efficace en lui confiant leurs enfants ou sanctionner une école qui ne l’est pas en les retirant de celle-ci.
Les écoles aux moins bons résultats subissent donc une pression pour s’améliorer, mais elles ont également la possibilité d’identifier les formules gagnantes des meilleures écoles et de les adopter. En somme, si l’exercice est bien fait, tout le monde y gagne : les écoles par accès à un outil de comparaison et d’amélioration, les parents par la possibilité de faire le meilleur choix pour leurs enfants et, principalement, les élèves qui bénéficient d’un environnement scolaire motivant et mieux adapté à leurs besoins.
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